Créé en 2007 par la Fédération mondiale de l’hémophilie (FMH) USA, le Fonds Susan Skinner a pour objet de soutenir la formation, l’éducation et de développer les compétences d’encadrement de jeunes femmes atteintes d’un trouble de la coagulation. Nikole Scappe a reçu une bourse du Fonds Susan Skinner en 2017. Nous l’avons interrogée sur ce que cette bourse a changé dans sa vie.
Pourquoi avez-vous postulé à une bourse du Fonds Susan Skinner ?
Au cours des 12 dernières années, j’ai écouté des milliers d’histoires, des parcours de vie où les troubles de la coagulation ont eu une incidence positive ou négative. Je dois malheureusement avouer que, lorsque j’ai commencé à faire du bénévolat, la plupart des récits que j’entendais étaient négatifs, notamment s’agissant des femmes atteintes d’un trouble de la coagulation sans aucun diagnostic posé. Mon propre parcours, j’ai été diagnostiquée mais je n’ai pas bénéficié d’un traitement adéquat, fait que leurs récits résonnent en moi. C’est en voyant la peur, la frustration et la déception dans leurs yeux que j’ai décidé de plaider la cause des patients, de faire du bénévolat et de jouer le rôle de mentor. J’estime que personne ne devrait vivre avec un trouble de la coagulation sans bénéficier d’un traitement. Toutes ces histoires ont allumé en moi le feu sacré. Je n’imaginais pas que tant d’hommes et de femmes n’avaient pas de traitement, ou que leur traitement n’était pas adapté, comme dans mon cas. Alors, au lieu de me plaindre, j’ai décidé de passer à l’action.
Dans les deux premières années de mon action bénévole, je me suis concentrée sur les membres de mon comité régional à l’ouest de la Pennsylvanie. C’est par mon comité que j’ai découvert la National Hemophilia Foundation (NHF) aux Etats-Unis, qui, à son tour, m’a donné la possibilité d’agir au niveau national. Après avoir rejoint le programme du National Youth Leadership Institute (NYLI) mis en place par la NHF, j’ai saisi toutes les occasions d’intervenir lors d’événements, de faire du bénévolat et d’assumer de nouvelles responsabilités. J’y ai passé mes week-ends, mes vacances, des nuits blanches et j’ai raté des fêtes pour faire du bénévolat. Certaines personnes passent leur vie à trouver leur voie. Pour moi, c’est évident, ma voie, c’est de plaider notre cause et d’avoir des responsabilités au sein de notre communauté.
Sur le plan de la recherche, quelles sont les difficultés auxquelles doivent faire face les femmes atteintes de troubles de la coagulation aujourd’hui ?
Les enjeux auxquels doivent faire face les femmes aujourd’hui, c’est d’obtenir un diagnostic et d’accéder à une prise en charge adéquate par rapport à leurs symptômes. Trop souvent, j’entends des histoires de médecins qui ignorent les besoins de leurs patientes, du simple fait que ce sont des femmes ou de la complexité des analyses sanguines. Diagnostiquer la maladie de von Willebrand, voilà la principale difficulté pour les femmes atteintes d’un trouble de la coagulation à l’heure actuelle. Il faut, en moyenne, six à neuf ans pour obtenir un diagnostic correct. Et pour celles qui ont été diagnostiquées avec la maladie de von Willebrand, le débat reste encore ouvert sur le fait de savoir si elles bénéficient d’un traitement véritablement adapté. Tant que le débat sur le diagnostic et la prise en charge ne sera pas tranché, les recherches ne porteront pas sur cet important groupe de patients.
D’après vous, pourquoi est-il important d’octroyer une telle bourse à une femme ?
Je pense qu’il est fondamental qu’une telle bourse soit attribuée à une femme car nous formons la dernière minorité visible de la communauté concernée par les troubles de la coagulation. Dans certains pays, les médecins refusent de reconnaître que les femmes peuvent être atteintes d’un trouble de la coagulation. Il est donc indispensable de donner de la visibilité à ces femmes et de sensibiliser le grand public et les médecins à l’existence des femmes atteintes de maladies hémorragiques rares.Dans quelle mesure cette bourse aura-t-elle une incidence sur votre implication auprès de la communauté concernée par les troubles de la coagulation ?
Cette bourse va très probablement avoir une incidence sur mon implication au niveau mondial. Je vais avoir l’occasion de rencontrer des gens, d’apprendre de nouvelles choses et de collaborer avec la FMH et avec les jeunes de la communauté concernée par les troubles de la coagulation.
Qu’espérez-vous apprendre de votre participation à la Formation mondiale destinée aux ONM, au Congrès mondial 2018 et à la Réunion annuelle de l’Assemblée générale de la FMH ?
J’aimerais participer à la formation des organisations nationales membres (ONM) afin de mieux comprendre les questions auxquelles doit faire face la communauté, aussi bien aux Etats-Unis que dans les pays industrialisés et en voie de développement. La Formation mondiale des ONM de la FMH donne l’occasion aux participants de renforcer leurs connaissances et leurs compétences en tant que leaders, ce qui est, d’après moi, extrêmement important. En effet, être conscient des problématiques liées aux jeunes, planifier la succession au sein de l’association, être un meilleur dirigeant, sont des compétences essentielles pour toute personne qui veut creuser son sillon au sein de la communauté. Cette formation me donnera les outils qui me permettront de me mettre au service de la communauté et d’être utile à plus grande échelle. J’aimerais découvrir également comment les pays les moins privilégiés parviennent à développer leurs programmes avec des ressources très limitées. En travaillant dur, il est possible de survivre avec ce que vous avez sous la main, c’est ce que font de nombreuses ONM.
J’aimerais participer au Congrès mondial 2018 de la FMH pour toute une série de raisons. Je pourrai assister à des sessions concernant les tout derniers développements et les progrès scientifiques au sein de la communauté. J’étais bénévole lors du Congrès mondial 2016 de la FMH à Orlando, j’ai vu le nombre de sessions proposées et l’intérêt qu’elles pouvaient avoir. Malheureusement, j’étais avant tout au service des participants et je n’ai pas pu assister à la plupart de ces sessions. Aller au Congrès mondial 2018 en tant que participante, cette fois-ci, serait fantastique. Il y a tant à y apprendre. Il y a tant de gens prêts à t’apprendre des choses et disposés à apprendre ce que tu sais.
Assister à l’Assemblée générale de la FMH est une occasion unique dans une vie. J’avoue que j’en ai toujours rêvé. J’ai assisté à ces réunions du Medical and Scientific Advisory Council (MASAC) de la NHF, à celles de son Conseil d’administration, à des conférences et à d’autres événements, mais je n’ai jamais eu l’honneur de participer à une réunion aussi prestigieuse. L’idée d’être dans la même pièce que des personnes aussi éminentes pour la communauté me donne des frissons. Être le témoin des débats des ONM sur la composition des comités de la FMH, ses membres, les nouvelles adhésions et les candidatures aux Congrès à venir est absolument passionnant. Je vais découvrir tant de choses à l’Assemblée générale. Je pense que cela m’aidera à renforcer mes compétences. Et je pense aussi que cela va m’aider à réaliser mon rêve, celui de postuler à un poste d’administrateur au sein du Conseil d’administration de la WFH USA.
Quel sera votre premier projet une fois votre bourse reçue ?
Le premier projet auquel j’espère contribuer est l’élaboration d’un programme de formation pour les futures dirigeantes de notre communauté. Il existe de nombreux programmes destinés aux hommes, mais peu qui ciblent exclusivement les jeunes femmes atteintes d’un trouble de la coagulation. J’espère pouvoir contribuer à la planification stratégique et à l’organisation d’un tel événement à l’échelle mondiale.
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