La Fédération mondiale de l’Hémophilie (FMH) a mené une étude scientifique qui montre que la prévalence de l’hémophilie est plus forte que ce qui a été précédemment estimé, et qui donne pour la première fois une estimation de l’hémophilie à la naissance (Annals of Internal Medicine, 10 septembre 2019).
L’hémophilie est un trouble héréditaire de la coagulation provoqué par un déficit en gènes FVIII ou FIX, qui ont pour fonction d’encoder les instructions pour la production de protéines constituant les facteurs qui aident le sang à coaguler. L’absence de traitement peut mener à des maladies articulaires chroniques et handicapantes. Des saignements internes aux organes et des hémorragies intracrâniennes peuvent également conduire à un handicap voire au décès du patient. Le traitement vise à prévenir ou à arrêter les saignements débilitants et potentiellement mortels. Cependant, le traitement est cher et rare dans de nombreux pays.
Des chercheurs des universités McMaster, North Carolina State, Aix-Marseille et Sheffield ont uni leurs efforts pour répondre à l’appel à l’action lancé par la Fédération mondiale de l’hémophilie (FMH) visant à établir des estimations précises de la prévalence de l’hémophilie, y compris à la naissance, ainsi que de la réduction de l’espérance de vie des patients masculins atteints d’hémophilie A ou B. Toutes ces informations sont fondamentales pour mettre en place une amélioration des soins de l’hémophilie au niveau international. Les auteurs ont procédé à une méta-analyse des données présentes dans les registres de pays où ils sont exhaustifs (Australie, Canada, France, Italie, Nouvelle-Zélande et Royaume-Uni) et ont conclu que la prévalence de l’hémophilie est plus forte que ce qui avait été estimé auparavant. Les auteurs rapportent en effet une prévalence, pour 100 000 patients masculins, respectivement de 17 pour toutes les formes de l’hémophilie A, de 6 pour l’hémophilie A sévère, de 4 pour toutes les formes de l’hémophilie B et de 1 pour l’hémophilie B sévère. Pour la première fois, la prévalence de l’hémophilie à la naissance a été estimée : elle est définie comme le nombre d’enfants nés hémophiles pour 100 000 naissances masculines. Pour 100 000 naissances masculines, la prévalence est respectivement de 25 pour toutes les formes de l’hémophilie A, de 10 pour l’hémophilie A sévère, de 5 pour toutes les formes de l’hémophilie B, et e 2 pour l’hémophilie B sévère. Cela signifie qu’environ 1 125 000 hommes souffrent d’hémophilie dans le monde, dont 418 000 d’hémophilie sévère, et que la plupart d’entre eux ne sont pas diagnostiqués. Le déficit d’espérance de vie pour les personnes atteintes d’hémophilie dans les pays à hauts revenus est de 30 % pour l’hémophilie A, de 37 % pour l’hémophilie A sévère, de 24 % pour l’hémophilie B, et de 27 % pour l’hémophilie B sévère. Dans les pays à faibles revenus, le déficit d’espérance de vie est beaucoup plus élevé, car l’absence de traitement a des conséquences terribles pour la population atteinte d’hémophilie. On observe ainsi respectivement un déficit d’espérance de vie 64 %, 77 % et 93 % pour les pays à revenus moyens supérieurs, revenus moyens inférieurs et faibles revenus (selon les définitions de la Banque mondiale).
Le Dr. Alfonso Iorio, auteur principal de l’article et ancien membre du Comité Données et démographie de la FMH, a déclaré : « Cet article est un tournant dans notre combat pour les soins aux patients hémophiles du monde entier. Savoir combien de patients concernés il y aura dans chaque pays au prorata de sa population est une importante mesure de l’efficacité du système de santé. Savoir combien de patients vont être diagnostiqués ou combien ne sont pas comptabilisés dans les registres nationaux et internationaux permet de mesurer les efforts qui restent à faire. Savoir combien de patients sont déjà concernés permettra aux systèmes de santé d’estimer correctement les ressources dont ils ont besoin, et aux entreprises pharmaceutiques d’augmenter leur investissement dans la recherche, pour qu’il corresponde à la demande d’une population de patients trois fois plus large que ce qui était estimé. Cela permettra également de souligner l’importance des campagnes de sensibilisation et de diagnostic. »
Le Dr. Glenn Pierce, vice-président du Comité médical de la FMH, a souligné l’importance de ce travail à la FMH : « Cela montre tout l’intérêt des registres de qualité qui sont produits par la communauté de l’hémophilie. Voir ce travail publié dans un journal de médecine interne très réputé aux États-Unis prouve que la crédibilité de notre communauté s’est accrue au fil des années, et présage de beaux succès pour le Registre mondial des troubles de la coagulation de la FMH. »
Pour lire le communiqué de presse du site Annals of Internal Medicine, cliquez ici.
Référence de la publication scientifique
Iorio A., Stonebraker J.S., Chambost H. et al., « Establishing the male prevalence and prevalence at birth of hemophilia. A meta-analytic approach using national registries », Ann Intern Med., 10 septembre 2019 [e-publication avant impression]. doi:10.7326/M19-1208